​Étoile d'hiver

Sans un bruit, elle tombe et se pose, la petite étoile blanche. Il y a encore quelques instants, elle virevoltait pourtant dans le ciel d’hiver, plus lumineuse qu’un morceau de soleil sur un diadème d’argent. À elle seule, malgré sa taille infime, elle faisait de la toile bleu nuit une peinture qui attirait l’œil. Et les rares passants, ceux prêts ou obligés de braver le froid mordant, ces gens-là l’observaient en retenant leur souffle, de peur de la faire fuir d’un coup de vent malheureux. Ah, ce qu’elle était belle… Elle dansait mieux que n’importe qui, plus légère qu’une plume, entourée d’une aura éthérée, tournoyant si vite, de façon si fluide que vous en aviez le tournis. À travers la noirceur de la nuit, l’astre avait été le phare des âmes errantes, subjuguant les esprits, chassant vos soucis le temps d’un instant. Elle avait brillé, unique dans sa robe gelée. Jusqu’au moment où, dans son excitation, elle s’était approchée trop près du sol. Maintenant, fini. Plus de danse. Elle a probablement dû s’essouffler, à tournoyer ainsi. Oui, c’est pour ça qu’elle s’est posée, il ne peut en être autrement. Si je prie assez fort, si je lui donne un instant pour respirer, c’est sûr qu’elle s’envolera à nouveau, d’un gracieux battement d’ailes, pour m’émerveiller encore. Alors j’attends. J’attends. Mais rien. Le premier flocon de neige de l’hiver reste inerte, maintenant dissout sur le béton froid.

 

©Texte Viviane Bossi Peinture: Christine Bourgeois